Comprendre
Pratique de la pasteurisation

Au cours de son évolution, devenu sédentaire, l'homme chercha à conserver baies et fruits pour une consommation ultérieure. Il dut alors constater que la moisissure et la pourriture rendaient ces produits non consommables. Pour cette raison, il commença à broyer les fruits pour en extraire le jus et l'entreposer. Pendant des millénaires, on ne comprenait pas pourquoi les jus doux bouillonnaient après peu de temps, avec de petites bulles remontant à leur surface, pourquoi ils se troublaient et pourquoi des particules se déposaient au fond des vases.

Vers 1620 seulement, le chimiste allemand J.J Becher observa que seuls les liquides doux fermentaient. Par la suite, de nombreux savants ont étudié le processus de la fermentation alcoolique, les levures et les micro-organismes engendrant des maladies. Comment pouvait-on maîtriser le processus de la fermentation et les causes d'altération ? Cette question resta longtemps sans réponse. Ce n'est qu'au XIXe siècle que le chimiste et biologiste français Louis Pasteur aborda ce problème, des marchands de vins et brasseurs lui ayant demandé de leur accorder son aide pour combattre diverses altérations de leurs produits.

Au cours de ses travaux sur des boissons fermentées présentant des défauts de qualité, Pasteur fut amené a se pencher sur la formation de l'acide lactique et découvrit qu'elle avait pour origine une bactérie microscopique en forme de bâtonnet. En même temps, il décela que les fermentations étaient dues à un certain type de micro-organismes, les levures. Pasteur était d'avis qu'il devait être possible d'interrompre la fermentation. Aussi, il démontra que les levures et de nombreux autres micro-organismes pouvaient être rendus inoffensifs par un échauffement à 70° C. Il a ainsi révélé que l'on pouvait, grâce à ce procédé, conserver les précieux jus de fruits et les préserver d'une transformation en fermentation. Sans le savoir, il posa le fondement de l'utilisation sans distillation des jus de fruits, si importante de nos jours.

Principe

Utilisation d'un traitement thermique visant à tuer les moisissures et à inactiver les organismes qui pourraient altérer le jus. Les levures, responsables de la fermentation, sont détruites à la température de 68°C. Cependant, afin de pallier à un défaut de l'homogénéité de température du jus ou de la précision du thermomètre, le jus se chauffe à la température de 75°C. Une élévation supérieure de la température dénaturerait le jus qui perdrait alors ses qualités gustatives et nutritionnelles.

Application

Différentes méthodes permettent de chauffer un jus. En voici deux:

Le chauffage à l'aide d'un échangeur de chaleur

Le jus à chauffer circule dans l'échangeur en sens inverse de l'eau chaude, prélevant au passage les calories de cette dernière. La source d'énergie pourra être l'électricité, le gaz, une chaudière de chauffage central ou encore une chaudière à vapeur. Avec ce système, le débit de jus chaud est continu.

Le chauffage au moyen d'un appareil à électrodes (thermoplongeur)

C'est le système le mieux adapté pour la pasteurisation des jus dans le cadre familial. En effet, ce système demande peu de matériel et reste simple d'emploi.

Un thermoplongeur comprenant trois électrodes (charbons) est alimenté par du courant électrique 380 volts. Il est plongé dans le jus à chauffer. Le jus contenant des substances dissoutes (sucres) jouera le rôle de résistance au passage du courant électrique; il s'ensuivra une élévation de la température du jus. Plusieurs longueurs d'électrodes sont disponibles sur le marché. Leur choix sera effectué en fonction de la richesse du jus en substances dissoutes. Plus il est riche, plus les électrodes seront courtes. Les électrodes sont choisies de façon à obtenir un débit électrique pour l'installation de 10 à 12 ampères. Si l'on utilise un courant trop fort (électrodes trop longues), le jus peut prendre un goût de cuit. La consommation d'électricité va diminuer au fur et à mesure que le jus s'échauffe puisque la résistance électrique du jus diminue lorsque sa température s'élève. Une consommation électrique trop forte ou une installation électrique trop faible feront fondre les fusibles et obligeront l'utilisation de charbons plus courts. Le branchement de l'appareil se fait sur une prise alimentée en courant triphasé, l'appareil lui-même répondra aux normes de sécurité en vigueur et sera donc équipé d'un disjoncteur pour courant de défaut.

Attention: lors du remplacement des charbons, nettoyer le filetage avant de les visser.

Utilisation du thermoplongeur

  1. Bonbonne
  2. Appareil à électrode "Pasteur"
  3. Capuchon de protection (les électrodes se trouvent à l'intérieur du capuchon en matière isolante)
  4. Câble
  5. Support de réglage
  6. Thermomètre
  7. Trop-plein
  8. Robinet de soutirage
  1. Le jus préalablement clarifié est transvasé dans des bonbonnes de 25 litres, en plastique ou verre en prenant garde de ne pas bouger la cuve, ce qui remettrait les bourbes en suspension. Le remplissage des bonbonnes peut se faire par siphon ou soutirage à partir de la cuve.
  2. Placer la bonbonne sur un banc de pasteurisation, si possible en bois (isolation électriques à une hauteur de 30 à 40 cm pour faciliter le travail.
  3. Fixer le «trop-plein» pour recueillir l'écume et le jus qui pourrait déborder durant la pasteurisation.
  4. Introduire le thermoplongeur jusqu'au fond de la bonbonne, de façon à ce qu'il soit légèrement penché mais pas trop proche du robinet de soutirage.
  5. Placer le thermomètre dans le logement prévu à cet effet.
  6. Enclencher l'installation. Lorsque le jus est très froid et que l'on travaille avec des bonbonnes en verre, il convient de brasser le liquide lorsqu'il a atteint 45° C en soutirant 3 à 4 litres qui seront remis dans la bonbonne, ceci afin de prévenir le risque de casse. En effet, la bonbonne supporte difficilement une différence de température entre sa base et son sommet. Débrancher le thermoplongeur pendant cette opération.
  7. Chauffer le liquide jusqu'à ce qu'une température de 75° C soit atteinte dans l'ensemble du volume.

 

Recommendations de sécurité

Le thermoplongeur utilisant le courant fort (380 volts) ne doit en aucun cas être enclenché avant d'être immergé dans la bonbonne. De même, il sera déclenché avant d'en être ressorti.

Pour prévenir tout risque de brûlure ou d'électrocution, l'utilisateur se munira d'un tablier plastique et de bottes en caoutchouc.

Incidents pouvant arriver pendant la pasteurisation

Le disjoncteur "EFI" se déclenche lors de la mise en service

  • Changer les 3 joints d'électrodes.
  • Vérifier l'état du câble plongeur (ne doit pas être fissuré).

Les fusibles fondent

  • Installation électrique trop faible, vérifier la puissance des fusibles.
  • Réduire la longueur des électrodes.

Échauffement du câble

  • Courant électrique trop fort, réduire la longueur des électrodes.

Échauffement des fiches et des prises électriques

  • Vérifier le serrage des fils.

Chauffage très lent (plus de 20 minutes pour 25 litres)

  • Il manque une phase, vérifier les fusibles
  • Mettre des électrodes plus longues
  • L’alimentation électrique du bâtiment est déficiente (grosse consommation)

Mise en bouteilles en remplissage à chaud

Pour de faibles quantités, (moins de 20 litres) il est possible de remplir des bouteilles à chaud, avec du jus chauffé dans une casserole.

Les bouteilles, bocaux à vis ou à étrier sont soigneusement lavés et ébouillantés. Afin d’éviter l’éclatement, ils doivent être encore bien chauds lorsqu’ils sont remplis à ras-bord de jus chauffé à 75°C, et fermés immédiatement. Les bouchons et couvercles peuvent être trempés préalablement dans une solution d’eau additionnée de 2% d’acide sulfureux à 5% afin qu’ils soient parfaitement désinfectés.

Pasteurisation au bain-marie

Pour de faibles quantités également, il est possible de pasteuriser les bouteilles dans une chaudière ou une marmite à stériliser à bain-marie, de la manière suivante:

 

  • Déposer une grille ou claie en bois au fond de la chaudière ou de la marmite à stériliser.
  • Remplir les bouteilles ou bocaux de jus froid, jusqu’à 5-6 cm du bord (avec la chaleur, le jus arrivera jusqu’au rebord du contenant).
  • Déposer les bouteilles dans la chaudière ou la marmite en veillant à ne pas qu’elles se touchent.
  • Remplir la chaudière ou la marmite d’eau froide jusqu’à un minimum de ¾ de la hauteur des récipients.
  • Chauffer à feu doux jusqu’à ce que la température du jus dans les bouteilles atteigne 75°
  • Retirer les bouteilles et les déposer sur une surface en bois, les boucher immédiatement comme pour le remplissage à chaud.

Pasteurisation des jus de raisin

Les jus de raisin sont parfaitement adaptés à être conservés sans fermentation, toutefois certaines particularités sont à relever:

  • La clarification enzymatique n'est pas réalisable en raison de la composition du jus. On aura recours au débourbage ou à une filtration. Le jus de raisin étant plus riche en sucre que le jus de pomme, le départ en fermentation sera plus rapide si la température du jus atteint 15°C.
  • La technique de pasteurisation du jus de raisin est la même que celle utilisée pour celui de pomme. Cependant, la teneur en sucre plus élevée qu'il contient impose l'emploi d'électrodes plus courtes (35 mm).
  • Le matériel de conditionnement, de stockage et d'entreposage sera le même que pour le jus de pomme.